L'histoire du Old London Bridge, segment de ville longtemps 
                  solitaire et donc plus essentiel pour Londres que les ponts 
                  de Paris, devient une vaste fresque qui va de 1209 à 
                  1758, un véritable roman architectonique, avec ses différentes 
                  phases de construction, ses incendies, ses drames, ses quartiers, 
                  ses péripéties saisonnières.
                  On retient les visions de la Tamise glacée, où 
                  le vieux London Bridge perd son utilité sans pour autant 
                  rapprocher les villages des deux rives. Les arches en étaient 
                  singulièrement resserrées, formant comme une sorte 
                  de grille, comme s'il fallait non seulement franchir, mais aussi 
                  organiser le trafic du grand fleuve. Le problème trouvera 
                  une autre solution avec la construction, au tournant du siècle 
                  (1894), du Tower Bridge, dont le dessin pseudo-médiéval 
                  laisse loin derrière lui tous nos Viollet-le-Duc. 
                  
                  Cest sans nul doute cette histoire du Old London Bridge 
                  qui inspira et inspire encore grand nombre darchitectes 
                  à Londres. Quel prestige dinscrire son style dans 
                  une telle mégalopole ! Urbanistes et architectes voient 
                  surtout dans le pont habité la possibilité de 
                  donner un fort dynamisme à la ville. La Tamise se révèle 
                  large, près de trois cents mètres et freine ainsi 
                  les échanges entre les deux rives. La solution du pont 
                  habité, qui ne procure pas simplement la fonction de 
                  franchissement, tente par lattraction quil suscite 
                  avec ses commerces, ses services, etc., de devenir un lien vivant 
                  entre les deux parties de la ville. Ainsi les architectes essayent 
                  de convaincre élus, investisseurs, et population mais 
                  encore aujourdhui sans grand succès.
                
                  Une réhabilitation du Tower Bridge vu par Holden.
                
                
                  En 1948, Holden suggéra de restructurer complètement 
                  le célèbre Tower Bridge de Londres, en lenveloppant 
                  dune deuxième peau de verre permettant de greffer 
                  vingt mille mètres carrés de bureaux autour des 
                  deux tours et des tabliers latéraux du pont. Cest 
                  le premier exemple connu dun pont habité conçu 
                  pour accueillir des activités tertiaires.
                  Le pont comme nous pouvons lobserver aujourdhui 
                  fut dessiné par lArchitecte de la Ville, Sir Horace 
                  Jones en collaboration avec lingénieur Sir John 
                  Wolfe Barry en 1894.
                  Mais La Tower Bridge de Londres nest pas un pont habité, 
                  au sens propre du terme, car il na pas dautres fonctions 
                  que celle de permettre aux véhicules de franchir la Tamise. 
                  Ces deux immenses tours néo-gothique rappellent le rôle 
                  défensif des ponts fortifiés du Moyen ge comme 
                  celui de Cahors en France. En réalité, ces deux 
                  tours accueillaient la machinerie nécessaire au fonctionnement 
                  du pont à bascules qui pouvait laisser le passage aux 
                  gros bateaux partant vers locéan.
                  Néanmoins, cest une structure importante depuis 
                  que limpact de son architecture permis de dynamiser les 
                  deux rives de la Tamise, jouant un rôle symbolique pour 
                  la ville de Londres. Le problème de construire un nouveau 
                  pont près du Tower Bridge fut posé quand, plus 
                  dun million de personnes sinstallèrent à 
                  lest du London Bridge, le plus vieux des ponts de Londres, 
                  et durent traverser la Tamise en bateaux-navettes ou en métro. 
                  Nombres de projets furent élaborés pour un nouveau 
                  pont qui aurait permis le passage des piétons, des véhicules 
                  mais aussi des gros ferrys. 
                  Le Tower Bridge fut endommagé par les bombardements de 
                  la Deuxième Guerre Mondiale. Plutôt que de le restaurer, 
                  W.F.C. Holden préféra lui, proposer à la 
                  Bridge House Fund en 1943, sans pour autant être sollicité, 
                  un Crystal Tower Bridge. Son idée était de remplacer 
                  le pont par une immense superstructure en verre formant une 
                  surface de plus de 7 000 mètres carrés de bureaux. 
                  Le projet ninspira guère, et le pont fut restauré 
                  à son état original.
                
                   Un pont-ville pour Seifert.
                
                
                  Ce Pont-Ville de 1980 est une proposition sérieuse, commercialement 
                  viable, pour un nouveau pont franchissant la Tamise. Son concepteur, 
                  John Seifert, proposait doffrir une alternative aux 30 
                  000 personnes utilisant le London Bridge chaque jour pour se 
                  rendre en ville.
                  Reliant le Billingsgate Market sur la rive nord à Tooley 
                  Street au sud, le pont aurait été occupé 
                  de services publics, de magasins et de bureaux.
                  Le principe fondamental du concept est que le pont ne 
                  possède pas uniquement la fonction de passage mais il 
                  offre une rue aux attractions diverses enrichissant la vie de 
                  Londres et attirant la population vers la Tamise.
                  Au cur du projet, on trouve une place publique de la taille 
                  de celle de Leicester, avec des arbres, une patinoire, des cafés
 
                  Deux restaurants surplombant la place sont desservis par des 
                  ascenseurs extérieurs offrant un magnifique panorama. 
                  Dans le projet, le pont dispose de 4 500 m2 de magasins et loisirs, 
                  5 000 m2 despaces publics, et 30 000 m2 partagés 
                  entre bureaux et habitations.
                
                  Le Pont Hungerford. Richard Rogers et partenaires.
                
                
                  Le premier pont Hungerford dessiné en 1836 par Isambard 
                  Kingdom Brunel cherchait à attirer des clients pour le 
                  marché du Charing Cross sur la rive sud de la Tamise. 
                  Finalement le marché ferma, et le terrain fut acheté 
                  par la compagnie des chemins de fer de Charing Cross qui inaugura 
                  en 1864 son nouveau Terminus : le Charing Cross Terminus. Le 
                  pont dessiné par Brunel fut alors démonté, 
                  ses câbles réutilisés pour le pont suspendu 
                  de Clifton, et ses piliers servirent à la construction 
                  dun pont piéton et de chemin de fer. 
                  Le pont Hungerford fut ensuite lobjet de nombreux projets 
                  de réhabilitations : en 1906, à Londres, Colcutt 
                  proposa de restructurer le Charring Cross Bridge sur la Tamise 
                  en y imbriquant une centaine de boutiques, rendant ainsi un 
                  nouvel hommage au Ponte Vecchio de Florence.
                  Cest en 1986 que Richard Rogers proposa sa démolition 
                  complète, stoppant ainsi les trains pour la Charing Cross 
                  Station sur la rive sud, à Waterloo Station. Il exposa 
                  à la Royal Academy of Arts un pont-île 
                  remplaçant complètement le précédent, 
                  équipé dun module de transport permettant 
                  aux piétons de franchir la Tamise. Ce nest que 
                  récemment que le Cross River Partnership associé 
                  aux 5 banlieues de Londres a organisé, en relation au 
                  projet Millenium, un concours pour la réhabilitation 
                  du pont.
                  Les plans durbanisation que Richard Rogers présenta 
                  à la Royal Academy en 1986 cherchaient principalement 
                  à renforcer les liens entre la rive sud et nord mais 
                  aussi à consolider les espaces publics du cur de 
                  Londres. Deux interventions radicales sur les transports fondaient 
                  sa proposition : le détournement de lEmbankment 
                  Road sous le fleuve, et la transformation de Charing Cross dans 
                  le but de former un pôle déchanges avec Waterloo 
                  Station.
                  Le détournement de la route rend possible le lien entre 
                  tous les jardins existants sur la rive avec le linear 
                  park de plus dun kilomètre de long. La transformation 
                  de la Charing Cross Station seffectue par le remplacement 
                  du large et inélégant Pont Hungerford par une 
                  passerelle pédestre légère, supportant 
                  un train-navette suspendu, et reliant la rive sud et sa nouvelle 
                  gare à la station de métro Embankment et Trafalgar 
                  Square.
                  Avec un mât aligné avec Northumberland Avenue, 
                  le nouveau pont crée ainsi une route directe de Trafalgar 
                  Square à la rive sud. En dautres termes, la relation 
                  de la rive sud avec le centre de Londres devient plus claire 
                  et immédiate. La nouvelle passerelle était dessinée 
                  pour être aussi légère que possible, dégageant 
                  au maximum la courbe que fait la Tamise à ce niveau. 
                  Trois tours  recevant salles dexpositions, plate-forme 
                  panoramique, cafés et restaurants  décomposent 
                  la vue et interagissent avec les Tours de la Maison du Parlement.
                  Une commission de 1995 cherchant à revitaliser la rive 
                  sud pousse Richard Rogers à poursuivre ses propositions 
                  ; ces dernières renforcent les liens entre la rive sud 
                  et son voisinage immédiat ainsi que la rive sud et nord 
                  de la Tamise. Le Pont dHungerford était vu auparavant 
                  comme une suite de connexions visant surtout à créer 
                  un accès fort entre Trafalgar Square et Waterloo Station. 
                  Deux routes, une locale, lautre métropolitaine, 
                  sont proposées le long de laxe du pont : la première, 
                  un tapis roulant sur le côté nord du pont, reliant 
                  Charring Cross à sa proche localité sur la rive 
                  sud, et la seconde, un pont habité le long du côté 
                  sud, avec une rue à léchelle de la ville 
                  reliant Trafalgar Square à Waterloo Station.
                  Différent de celui de 1986, ce dernier projet acceptait 
                  la contrainte du pont déjà existant et proposait 
                  de nouveaux espaces publics suspendus au-dessus du fleuve. Leffet 
                  de ces nouveaux espaces auraient pu être, en rendant plus 
                  proche les deux rives, de faire traverser les gens plus massivement 
                  dune rive à lautre. Comme son prédécesseur 
                  en 1986, ce pont habité aurait compris magasins, bars, 
                  cafés et restaurants, ainsi quune vue panoramique 
                  splendide en aval sur la Cathédrale St Paul, mais aussi 
                  en amont sur la Maison du Parlement.